Galerie ALFA
12 rue de l'échaudé
75006 Paris
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Du 24 mai au 22 juin 2013
Vernissage le 23 mai
ESPACES INTRANQUILLES
Bien que les
parallèles historiques soient toujours risqués, il est tentant d’en faire pour
lire les dernières huiles sur papier de Cristine Guinamand. Placé sous
l'inspiration revendiquée du « pendu » d'Otto Dix
(une gravure de 1922), on serait tenté d'intituler cet ensemble « France, les années noires » ou peut-être plus sûrement « Europe, les années noires » pour reprendre le titre d’une
exposition sur la nouvelle objectivité qui s'était tenue au musée Maillol en
2008.
Ces huiles sur
papier (à l'exception d'une, sur bois) sont presque toutes des vues
d'intérieurs, carcérales, et d'une ouverture, la fameuse fenêtre d'Alberti. Si
elles sont ouvertes sur le monde, de quel monde s'agit il ?
Un monde terrible...
Les intérieurs
reprennent la construction de la gravure de Dix et varient en couleurs vives,
saturées, ils recueillent comme des flashes lumineux la lumière du dehors. Une lumière atomique (l’Intérieur jaune le montre clairement), une lumière de fin du monde.
On pense à La Nuit
des morts vivants (Intérieur 1 et
2), des visages monstrueux
apparaissent, pénètrent l'espace. Dans Intérieur
aux chaises, la vision d'une chaise électrique envahit en la redoublant la
fenêtre. Scènes de désolation, d'un monde en ruine, nuit et brouillard partout,
pas d'issues, ces intérieurs sont bien une prison où
l'on est condamné à voir... l'horreur. L'artiste nous enferme pour nous obliger
à voir. Elle procède comme les juges dans Orange
mécanique. Par ce procédé presque totalitaire elle nous désigne comme
aveugle (Intérieur Cublaise),
ou au mieux comme borgne (Intérieur 2), et endosse un double rôle de bourreau
et de shaman (littéralement « être
éclairé »). L'Apocalypse
est révélation, ne l'oublions pas...
Il y a autre chose
toutefois. Je ne peux m'empêcher de penser à Van Gogh, la vivacité et la beauté
des couleurs qui contrastent avec la
morbidité, l'évocation bien sûr de La
Chaise ou de Chambre à Arles, dont le suicidé de Dix est aussi l'écho.
C'est bien d'elle-même que parle
Cristine Guinamand. Cette pièce, cet « intérieur » il faut le prendre littéralement : nous sommes dans sa tête.
La fenêtre est son œil, et ce
dehors... c'est nous.
Stéphane
Pencréac’h, mars 2013.